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Euh, alors, chapitre huit, hein? On va parler de... de propriétés plutôt que de raisons. Et aussi, l'invariance comme... comme vérité, quoi. C'est un peu costaud, mais bon, on va essayer de simplifier ça, hein?
Alors, déjà, la connaissance, c'est quoi? C'est l'information et la compréhension qui nous permettent de... de piger le monde, quoi. Mais, attention, la recherche de la connaissance, elle doit être alignée avec la recherche de la vérité. Sinon, bah, c'est pas de la connaissance, hein, c'est juste... c'est une agenda, quoi. On peut dire que la vérité, c'est un peu comme... ce qui persiste, quoi, par rapport à plein d'autres infos.
Et ça, ça veut dire que la vérité, elle est liée à la notion d'abstraction. Parce qu'une abstraction, c'est une catégorie de plus haut niveau avec des concepts en dessous. Et, seul la catégorie, elle résiste aux changements. Imagine, la moitié des races de chiens, pouf, plus là. Ça changerait rien à la catégorie "chien", quoi. Pareil si 1000 nouvelles races débarquent. Tant qu'il y a un ensemble de détails liés conceptuellement, le truc de plus haut niveau, il reste. Les abstractions, elles durent plus longtemps que les détails, c'est clair.
Bon, et bien, ce qui est vrai pour les abstractions d'information, c'est aussi vrai pour les abstractions physiques. Les configurations de matière au niveau supérieur, elles survivent toujours plus longtemps que les détails au niveau inférieur. Attention, hein, on parle de systèmes complexes, pas des trucs simples. Si on enlève un engrenage dans la transmission d'une voiture (système simple), bah, le levier de vitesse, il marche plus. Mais, dans un système complexe, c'est pas le cas. L'abstraction physique de haut niveau, c'est la conséquence de plein de configurations qui correspondent au... au "levier de vitesse" du système. C'est à cause de... comment dire... de la conséquence entropique de la réalisabilité multiple, comme on a vu avant.
Les structures et comportements qu'on observe, ils ont le plus grand nombre de façons possibles d'être atteints. C'est pour ça qu'ils sont invariants. Si les trucs qu'on voyait, ils étaient possibles grâce à juste quelques chemins bien définis, ils seraient trop fragiles pour survivre dans la nature, quoi.
Donc, plus on regarde un niveau d'abstraction élevé, plus c'est invariant. C'est vrai pour les versions physiques et informationnelles de l'abstraction. Ça nous montre qu'on a un repère pour savoir si quelque chose a plus de chances d'être vrai. Tout comme la nature, elle conserve que ce qui survit, la vérité, c'est ce qui reste invariant malgré le flux de tout le reste. D'où le titre de cette section, hein: l'invariance comme vérité.
La connaissance qu'on cherche, et qui doit être alignée avec la vérité, elle peut pas être basée sur les détails. Les détails, par définition, c'est éphémère. Ça peut pas nous raconter l'histoire de ce qui est. Mais les motifs abstraits de plus haut niveau, ils ont plus de permanence. Ils parlent des trucs vrais sur la nature et la vie en général.
Et là, on arrive à une réalisation importante sur notre concept de connaissance. L'idée que la connaissance, c'est quelque chose qu'on accumule, ça tient pas la route dans un système complexe. La connaissance, ça doit converger, pas s'accumuler. C'est très différent de ce qu'on nous raconte avec la science et l'ingénierie actuelles. On nous dit que la connaissance humaine, c'est une quête, et qu'il y a toujours plus à savoir. On nous dit qu'il faut continuer à enlever des couches, à aller dans de nouveaux endroits pour découvrir comment la nature marche. On nous dit que la connaissance, c'est comme un cercle qui grandit sans cesse, et que ses frontières dévoilent juste plus de choses inconnues.
Mais, si la vérité, elle est invariante, alors explorer plus loin, ça révèle juste ce qu'on savait déjà. C'est ce qu'on voit, souvent. Oui, les espèces qu'on découvre dans les profondeurs de l'océan, c'est des trucs qu'on a jamais vus, et c'est super fascinant. Mais, une nouvelle forme de vie, c'est juste un exemple des quelques processus qui régissent toute la vie. Il y aura toujours de nouvelles formes de vie à découvrir, mais ça veut pas dire qu'on apprend quelque chose de fondamentalement nouveau, hein.
La science et l'ingénierie, en général, ça consiste à accumuler et organiser la connaissance. Mais la connaissance, elle grandit que si elle est du genre réductionniste. Parce que la connaissance réductionniste, elle est faite de morceaux et de détails, et il y aura toujours plus de détails à découvrir. Mais, si on est honnête sur la façon dont la nature marche, ces détails, ils correspondent pas aux résultats qu'on mesure, observe et vit. L'hypothèse de base du réductionnisme, c'est que les morceaux et les connexions, ça révèle comment le phénomène qui nous intéresse fonctionne. Mais c'est faux.
Les morceaux qu'on apprend, ils sont pas responsables des structures et des comportements des phénomènes naturels. En tout cas, pas comme les réductionnistes le croient. L'histoire des morceaux et des connexions qui mènent à ce qu'on vit, c'était juste une façon pratique de délimiter ce qu'on voit, et d'attribuer le mérite, quoi.
J'ai dit que l'émergence, c'est le résultat inévitable des structures qui traitent l'information pour résoudre des problèmes difficiles. Plutôt qu'une histoire de cause à effet des petits morceaux aux grands morceaux, l'émergence, elle trouve juste les configurations nécessaires qui font correspondre plein d'entrées à moins de sorties. Ce genre de calcul, c'est pour servir les niveaux imbriqués qu'on trouve dans la structure d'un problème naturel.
La connaissance et la vérité en dehors du réductionnisme, c'est l'invariance. Et seul ce qui persiste est, par définition, invariant. Ça nous éloigne de l'idée que la connaissance grandit. Plutôt que la connaissance, ça consiste à accumuler plus d'informations, ça consiste à voir les mêmes motifs se répéter.
C'est un gros changement en termes de ce que l'appréciation de la complexité apporte à l'épistémologie. Toute théorie de la connaissance qui repose sur la connexion causale entre les détails et l'expérience, elle peut pas être correcte. Les méthodes, la validité et la portée de ce que la science et l'ingénierie actuelles apportent aux théories de la connaissance, c'est contraire à la façon dont la nature fonctionne.
Présenter la connaissance en termes d'un univers rempli de vérités à découvrir, c'est problématique. Ça veut pas dire qu'il y a pas de découvertes à faire, sinon, ce livre aurait aucun sens. Mais, ça redéfinit ce qu'on entend par découverte. Découvrir, c'est pas révéler des détails cachés qui font marcher un truc. C'est plutôt construire quelque chose qui marche. C'est pas découvrir de nouvelles connaissances, c'est découvrir des solutions qui fonctionnent pour résoudre les problèmes. C'est pas juste de la praxis, qui est l'application pratique de la théorie ou de la connaissance. C'est plutôt construire des choses. Nos solutions créatives, elles peuvent pas venir de connaissances précédentes, elles doivent émerger d'elles-mêmes.
La convergence des connaissances, c'est pour ça que les philosophies qui ont des milliers d'années, elles sont encore vraies aujourd'hui. Les vérités découvertes dans l'antiquité, c'étaient des abstractions invariantes, nées de vies agitées. Les détails de ces vies, ils ressemblent presque à rien de la vie moderne. Mais les vérités, elles sont toujours aussi pertinentes. C'est pas une tentative de connecter les vérités philosophiques à la technologie actuelle. C'est juste un aspect indéniable de la façon dont l'information fonctionne dans la nature. Encore une fois, on peut pas complètement séparer l'informationnel du physique. Et la tentative humaine de le faire, c'est juste une commodité épistémique.
Ça veut pas dire qu'on peut pas être surpris par une nouvelle espèce dans les profondeurs de l'océan, ou sous la canopée de nos forêts tropicales. Mais, quand on regarde ces espèces, l'aspect le plus vrai de leurs motifs physiques et comportementaux, il est pas si surprenant. C'est juste un autre exemple des solutions de la nature, qui résolvent des problèmes dans son environnement. Ces découvertes, elles reviendront toujours aux mêmes vérités fondamentales.
La découverte en science et en ingénierie, c'est moins dévoiler quelque chose qu'on savait pas, et plus exposer les mêmes motifs qu'on voit tout le temps. La vraie connaissance, celle qui est le plus alignée avec la nature, elle converge plutôt qu'elle ne grandit.
La science, elle a fait de l'explication sa raison d'être. Sa mission, c'est d'expliquer comment le monde marche. On nous dit que la puissance de la science, elle est dans sa capacité à découvrir les raisons causales derrière ce qu'on observe. La science, elle est là pour révéler les secrets de la nature et les utiliser pour contribuer à la masse grandissante de connaissances humaines et à notre progrès technologique.
Mais, faire reposer le but de la science sur l'explication, c'est une erreur. L'explication dans la science d'aujourd'hui, même si ça sonne comme un objectif digne d'intérêt, elle dépend complètement de la notion de connaissance interne, ce qui la rend principalement réductionniste. Pour expliquer quelque chose scientifiquement, on nous dit, c'est discuter de la façon dont quelque chose fonctionne à l'intérieur.
Une explication, elle présente une histoire causale sur la façon dont les résultats d'un phénomène sont produits. Si on prend un système relativement simple, comme un atome (simple par rapport à notre expérience), on peut expliquer les couleurs qu'on voit dans les matériaux en termes de transitions électroniques. Les électrons, ils passent de différents niveaux en émettant des photons de lumière à une fréquence donnée, et nos yeux, ils perçoivent ces fréquences comme de la couleur.
Mais, est-ce que c'est ça, vraiment, la couleur? L'émission de photons, elle joue un rôle, c'est sûr. Mais la couleur, elle existe dans le domaine de la complexité, pas de la simplicité. La perception, peu importe quoi, c'est bien plus que juste un décompte basique des particules qui frappent nos yeux. Nos cerveaux, ils traitent et interprètent ce qu'on voit.
Certains diront qu'on peut toujours ajouter plus de réductionnisme à notre explication, pour essayer de tenir compte de ce qui manque. Au-delà des propriétés physiques de la lumière, on peut décortiquer la biologie de notre système visuel, et peut-être ajouter de la psychologie pour expliquer l'interprétation subjective de la couleur. On peut dire que la perception de la couleur, ça implique un ensemble de processus dans l'œil, y compris l'absorption de la lumière par les cellules photoréceptrices, le traitement du signal par la rétine, et la transmission des signaux au cortex visuel, dans le cerveau.
Mais, et les facteurs comme les conditions d'éclairage, les autres couleurs autour, et les différences individuelles dans la perception? On sait pas si tout le monde voit les couleurs de la même façon. Il pourrait même y avoir une influence au niveau culturel, ce qui donnerait des associations et des interprétations distinctes de ce qu'on voit.
On peut continuer à ajouter plus d'explications pour tenir compte de la perception de la couleur, mais à quel moment ça devient n'importe quoi? L'émission de fréquences de lumière par les atomes, c'est un aspect de la couleur, mais ça offre à peine un pouvoir explicatif. Ajouter les explications biologiques et psychologiques, ça a juste l'air d'embrouiller les choses.
Le problème avec les explications réductionnistes, c'est qu'on peut toujours en faire. On peut toujours choisir un morceau du système et découvrir son existence isolée. Mais ce morceau isolé, c'est difficilement une explication pour ce qu'on mesure, observe ou vit. En réalité, l'isolement d'une chose nous dit presque rien sur comment les choses arrivent. La seule raison pour laquelle la plupart des gens croient aux causes isolées, c'est qu'on suppose que le morceau isolé est lié de façon causale à la perception. Mais c'est pas le cas. Ça peut pas l'être. On le sait, parce que dans le régime complexe, les morceaux mènent pas aux propriétés qu'on perçoit, pas de façon déterministe. Et pourtant, c'est comme ça que les explications sont vendues par l'entreprise scientifique. Ce déterminisme supposé, il est tellement ancré dans la perception de la science par la société que quand une explication est donnée, on suppose qu'elle est liée de façon causale à ce qu'on voit.
L'erreur fondamentale avec les explications, c'est que, pour les phénomènes complexes, on peut pas les tester. Contrairement à une prédiction, qu'on peut tester par l'observation répétée, une explication dans le régime complexe, elle est très difficile à réfuter. Imagine, expliquer l'émotion de la colère en mesurant une activité dans une région du cerveau. Oui, l'activité est réelle, et sa mesure aussi. On peut même affiner la mesure à un degré arbitraire, en ajoutant de plus en plus de précision à notre explication. Mais rien de tout ça peut rendre la connexion entre la région du cerveau et l'expérience plus réelle. La connexion réelle entre les découvertes réductionnistes et l'expérience humaine, c'est surtout de la fiction. C'est basé sur une connexion causale supposée qui n'existe pas. On sait qu'elle existe pas, parce que c'est pas comme ça que la nature fonctionne. La nature, elle produit pas des trucs de haut niveau en utilisant des connexions causales de trucs de bas niveau.
Pensez au rasoir d'Ockham, le principe de résolution de problèmes qui recommande de chercher des explications simples plutôt que des explications compliquées. Le but d'utiliser des explications simples, c'est pas parce qu'elles sont plus faciles à comprendre, ou parce que les théories simples doivent être plus vraies. C'est parce que les choses simples peuvent être détruites. Le rasoir d'Ockham, il marche parce qu'il admet une humilité épistémique, en disant qu'on peut pas savoir si quelque chose est vrai, mais on peut savoir s'il survit. Comme je l'ai dit avant, les choses survivent pas dans la nature pour des raisons aléatoires. La survie, c'est le plus grand témoignage de la validité d'une chose. Mais si les explications pour les phénomènes complexes sont difficiles à tester, alors le rasoir d'Ockham, il sert à rien. Les explications sont soutenues artificiellement, maintenues en vie à cause d'hypothèses fausses sur les découvertes qui sont faites: qu'elles sont connectées de façon causale et déterministe à ce qu'on vit.
Rien de tout ça n'enlève la nécessité épistémologique de s'assurer qu'on sait comment distinguer une croyance justifiée d'une opinion. Oui, l'incapacité à voir la causalité dans les systèmes complexes veut dire qu'il y a pas de façon de tester une explication réductionniste. Mais il y a plus qu'assez de raisons de savoir que ces explications sont fausses. Pas en testant avec l'observation répétée, mais en basant les arguments sur les propriétés et la logique.
On sait que les phénomènes complexes ont un ensemble de propriétés auxquelles ils adhèrent. Ces propriétés sont émergentes, et donc, elles apparaissent pas par un ensemble additif et déterministe d'étapes internes. C'est pour ça qu'il y a aucune raison rationnelle d'accepter les transitions électroniques comme une explication de la couleur. La couleur, elle a pas de sens sans la perception. Et la perception, c'est quelque chose qui émerge d'un phénomène complexe. Aucune quantité d'explications physiques, chimiques, biologiques ou psychologiques supplémentaires peut ajouter à l'image de la couleur, parce qu'il y a rien à ajouter.
Pour être clair, ça veut pas dire que les transitions électroniques, ou tout autre mécanisme biologique, chimique ou psychologique, jouent pas un rôle. Bien sûr que si. Mais connaître le rôle, c'est savoir presque rien. Comme je l'ai dit avant, dire que les mitochondries produisent de l'énergie, c'est intéressant, mais ça a peu de sens. Ce soi-disant "rôle", il disparaît complètement quand l'élément est enlevé de la cellule. Les rôles, c'est des délimitations pratiques, pas la réalité causale. Si quelque chose dépend complètement d'être intégré dans une matrice d'innombrables autres rôles, alors le mot "rôle" perd tout son sens.
La tyrannie de l'explication, c'est qu'elle nous force à voir le monde à travers la lentille de la connaissance interne. Elle fait accepter à la société seulement les mécanismes déconnectés trouvés par l'isolement et l'extraction comme des explications de comment le monde marche.
Si la pire transgression des explications réductionnistes était leur nature de conte de fées, elles seraient trompeuses au pire. Mais les explications réductionnistes se frayent un chemin dans nos conceptions. Prenez la santé. Quand une étude a été menée, montrant un résultat "statistiquement significatif", elle est souvent intégrée à la société. Les chercheurs vont isoler un aspect d'un phénomène lié à la santé et confirmer qu'il joue un rôle. Ça devient un chemin vers la santé humaine. Mais tout comme la connaissance interne des transitions électroniques, tout en étant vraie isolément, nous dit presque rien sur ce qu'est la couleur, il en va de même pour le rôle de toute vitamine, minéral ou intervention liée à la santé.
C'est pour ça que les explications des phénomènes complexes doivent reposer sur les propriétés et la logique, pas sur les explications réductionnistes. Mais la logique seule peut pas être la réponse quand elle est utilisée à l'intérieur d'un paradigme brisé. Parce que la logique fonctionne seulement quand les prémisses qui soutiennent une affirmation sont elles-mêmes valides. Quelqu'un peut faire un argument valide qu'il a découvert le chemin que la vitamine C joue dans la santé, mais seulement parce qu'il utilise des prémisses que la société suppose incorrectement être valides. C'est comme ça que notre paradigme réductionniste s'en sort avec autant de bêtises. C'est pas la logique qui est défectueuse. C'est pas qu'il y a pas de vraies découvertes qui sont faites. C'est l'hypothèse de base que ce qui a été découvert est automatiquement connecté aux résultats qu'on voit.
Mais si la logique est utilisée avec les propriétés connues pour être vraies dans les systèmes complexes, alors elle devient un outil puissant pour faire des arguments sur les phénomènes qu'on observe. La logique, couplée à une forme de connaissance plus appropriée, celle qui est basée sur les vérités invariantes, c'est un outil puissant pour raisonner sur ce qui est réel.
La logique, c'est le raisonnement mené ou évalué selon des principes stricts de validité. La logique fournit un cadre par lequel les humains peuvent soutenir des affirmations rationnellement, ce qui les fait accepter comme des affirmations généralement vraies. Je dis généralement, parce que dans le monde réel, il y a pas de déduction pure. Il y a toujours un aspect flou à la façon dont les prémisses peuvent être vraies, ce qui empêche la possibilité d'avoir des affirmations à la fois purement vraies et réalistes. En d'autres termes, seules les situations extrêmement simples peuvent être prouvées comme vraies, et la réalité ne consiste pas en des situations simples. C'est pour ça qu'il y a pas de preuve scientifique. La preuve logique, oui. La preuve mathématique, oui. La preuve scientifique, non.
Ça veut dire que la force d'un argument logique du monde réel repose entièrement sur ses prémisses. Alors que le système de logique peut assembler nos prémisses et nos conclusions, seule la vérité des prémisses peut lier un argument à la nature. C'est la proximité des prémisses de ce qu'on sait sur la nature qui rend quelque chose plus vrai.
La science réductionniste d'aujourd'hui utilisera la logique (de façon lâche et indirecte) pour défendre sa position. La science mène des expériences ou développe des théories, et ça, c'est fait pour soutenir la véracité des prémisses utilisées dans les arguments. Si quelqu'un mesure une activité dans une région du cerveau humain, il raisonnera sur la façon dont cette activité peut être utilisée pour déduire une conclusion liée à la source d'un comportement. Peut-être que les scanners IRMf révèlent une activité accrue dans le cortex préfrontal des participants pendant un processus de prise de décision. Les chercheurs raisonneront que le cortex préfrontal joue un rôle crucial dans la prise de décision. Jusqu'ici, c'est tout à fait valide. Mais cet argument repose sur une hypothèse profondément erronée sur la façon dont la nature fonctionne. Il suppose (et n'établit en aucun cas) qu'il existe une source neuronale de la prise de décision humaine. Dans un argument complet, ce serait une autre de leurs prémisses. Mais cette prémisse peut pas être vraie. Elle peut pas être vraie parce qu'on sait que les systèmes complexes ont pas de sources. La complexité, par sa définition même, repose sur l'émergence, qui ne fonctionne pas selon des emplacements ou des régions sources. L'émergence est atteinte d'une manière holistique et profondément interdépendante. Les propriétés des systèmes complexes, le cerveau humain étant le plus complexe de tous, peuvent pas produire des résultats en utilisant une région ou un emplacement.
L'hypothèse qu'il doit y avoir une source neuronale de la prise de décision humaine est une prémisse cachée (aussi appelée prémisse implicite). C'est une prémisse qui est pas explicitement énoncée, mais qui est supposée être vraie pour que la conclusion soit valide. Les prémisses cachées sont problématiques parce qu'elles passent inaperçues et ne sont pas examinées. Ça peut potentiellement mener à un raisonnement erroné. Dans le cas des soi-disant régions d'activité qui expliquent les résultats d'un système complexe, ces prémisses cachées sont carrément fausses, ce qui rend toute conclusion tirée de ces expériences bidon.
C'est la pourriture au cœur du paradigme scientifique et technique d'aujourd'hui. Alors que les prémisses réductionnistes fonctionnaient parfaitement bien dans la découverte et la construction de choses simples, elles sont fausses face à la complexité. La science et l'ingénierie d'aujourd'hui s'en sortent avec autant de réductionnisme parce que la logique n'est pas utilisée correctement pour défendre ses conclusions. La plupart des expériences et des théories d'aujourd'hui fonctionnent avec des arguments avec des prémisses cachées, enracinées dans le réductionnisme.
Pour le profane, ces études semblent parfaitement bien. Peut-être même éthiques. Si on nous dit que les études sur les régions du cerveau révèlent comment certains individus ont du mal à prendre des décisions quand cette région est altérée, ça suggère qu'il pourrait y avoir un traitement en aval. Mais c'est de la mauvaise science qui se fraye un chemin dans nos conceptions. Quand il s'agit d'intervention, c'est une recette pour le désastre, pas pour l'éthique.
Encore une fois, c'est pas la faute de la logique. C'est la faute d'une mauvaise compréhension de la complexité. La logique est un allié puissant du raisonnement humain, mais elle est seulement aussi forte que ses prémisses. La proximité des prémisses doit être proche de ce qu'on connaît de la nature. Et ce qu'on connaît, ce sont les propriétés, pas les causes.
Ça se résume à ce que j'appelle les propriétés plutôt que les raisons. Il y a pas un nombre illimité de propriétés à découvrir dans les systèmes complexes. Il y en a qu'une poignée, et ces quelques-unes sont tout ce qui est nécessaire pour prendre nos décisions les plus importantes en science, en ingénierie et dans la société en général.
Les propriétés sont mieux définies en opposition aux explications causales. Produire une explication causale implique d'identifier les causes ou les mécanismes sous-jacents qui produisent les résultats qu'on observe, dans un phénomène ou un événement donné. Les explications causales tentent d'expliquer comment quelque chose arrive. On pourrait expliquer comment un métal se dilate quand il est chauffé en discutant de l'augmentation de l'énergie cinétique des atomes, ce qui mène à une plus grande séparation atomique.
En revanche, une propriété, c'est un aspect descriptif d'un objet ou d'un phénomène. Elle répond à la question de ce à quoi un objet ressemble, pas comment il produit ses résultats. Dans notre exemple du métal, le fait que le métal se dilate quand il est chauffé, c'est une propriété du métal (la dilatation thermique). Ici, il y a pas d'appel aux mécanismes causaux. Juste le fait que le métal se dilate quand il est chauffé.
On peut penser aux propriétés comme des contraintes auxquelles la nature adhère. Les propriétés fixent les frontières à l'intérieur desquelles les processus physiques, chimiques et biologiques se produisent. Il y a beaucoup de propriétés dans la nature, comme le fait que la masse et l'énergie ne peuvent pas être créées ou détruites, seulement transformées. Comment la quantité de mouvement totale d'un système fermé reste constante dans le temps, à moins d'être affectée par des forces extérieures. Comment l'entropie ne diminue pas dans les systèmes isolés, comment la gravité attire les objets avec de la masse les uns vers les autres, et comment les forces électromagnétiques lient la petite matière. D'autres se rapportent au processus par lequel les organismes transmettent des traits, et comment ceux qui sont mieux adaptés à l'environnement ont tendance à survivre et à se reproduire. On sait que les écosystèmes présentent un cycle des nutriments et un flux d'énergie. On sait qu'il y a des contraintes sur la vitesse de la lumière. On sait que les propriétés des matériaux imposent des limites à ce qui est physiquement possible. On sait que les systèmes dans la nature ont tendance à rechercher l'équilibre et la stabilité par le biais de mécanismes de rétroaction. Et ainsi de suite.
Les propriétés précédentes ne sont pas comment les choses arrivent, elles sont pourquoi les choses arrivent. Dans les systèmes simples, le comment et le pourquoi sont essentiellement les mêmes. Si je demande pourquoi les planètes restent proches du soleil, la propriété de l'attraction gravitationnelle peut nous dire à la fois le comment et le pourquoi. Mais sous la complexité, c'est pas le cas. Si on demande comment toutes les planètes restent dans les positions où elles sont, on peut encore répondre au pourquoi (à cause de la gravité), mais on a du mal à répondre au comment (le processus spécifique qui maintient les planètes là où elles sont) de façon exacte. Étendez ça à des systèmes plus complexes et le comment disparaît complètement.
On a vu les différentes propriétés de la complexité tout au long de ce livre. Elles entrent dans les domaines plus larges de la thermodynamique, de la théorie de l'information, du calcul et de l'évolution. J'ai discuté du processus évolutif, la recette de la nature de la variation, de la sélection et de l'itération, de la façon dont l'entropie est liée de façon égale aux aspects physiques et informationnels des phénomènes, de l'utilisation de la compression d'information par la nature, de la structure imbriquée des problèmes, du déterminisme flexible, de la réalisabilité multiple, de la façon dont les processus de méta-niveau créent des abstractions, de la sélection de groupe, et du fait que les choses ne survivent pas pour des raisons aléatoires.
Tout ça découle de propriétés plus basiques comme la non-linéarité, l'auto-organisation, l'adaptabilité, la résilience, les boucles de rétroaction, la hiérarchie, la criticité, les dynamiques chaotiques et périodiques, la synchronisation, les transitions de phase, la bifurcation et la formation spontanée de motifs.
Alors que cette liste peut sembler longue, elle est plutôt petite en comparaison avec le nombre d'explications causales que les scientifiques et les ingénieurs avancent. Il y a pas de limites au nombre d'explications qui peuvent être inventées sous le réductionnisme. On peut toujours enlever des couches, choisir de délimiter un morceau de matière (gènes, régions, etc.) et ensuite inventer une histoire sur la façon dont il se connecte à ce qu'on observe à la surface.
Je soutiens que les descriptions scientifiques rigoureuses des choses, et toute prise de décision qui pourrait en découler, peuvent pas reposer sur des explications causales. Il est beaucoup plus scientifique de décrire et de décider sur la nature en se basant sur ses propriétés universelles et intemporelles. Les situations du monde réel, et tous les phénomènes de la nature, ont pas de chemins et de causes profondes. Ils ont des propriétés indéniables auxquelles ils adhèrent. Les propriétés sont les vérités invariantes qui existent dans l'abstrait, où vit la véritable vérité. Seulement par un cadre qui associe la logique aux propriétés, pas aux raisons, on peut entrer dans une phase intellectuellement honnête de la science et de l'ingénierie à l'ère de la complexité.
Ce que les propriétés de la nature nous montrent, et qui serait manqué si on était embourbés dans les causes, c'est qu'il y a une direction unique à la complexité. Les choses complexes présentent l'émergence soudaine et irréversible de structures physiques et de comportements. Les propriétés qu'on voit dans la nature n'arrivent pas à partir d'une source ou d'un chemin, elles se matérialisent à partir d'un système fantastiquement complexe de probabilités statistiques. Toutes les pièces sont nécessaires pour faire de la nature ce qu'elle est. Les solutions de la nature ne peuvent pas fonctionner sans que tout le groupe travaille de concert pour produire le résultat holistique. Dans les systèmes simples, chaque pièce ajoute de façon incrémentale au fonctionnement de l'ensemble. C'est pas comme ça que les systèmes complexes fonctionnent. Les systèmes complexes émergent en un instant, quand les pièces nécessaires sont en place pour calculer les réponses à leurs problèmes externes.
L'absence totale d'un chemin déterministe sous la complexité veut dire que la complexité fonctionne seulement dans une direction. On peut pas assembler les composants qui font marcher un système complexe. La complexité doit plutôt apparaître après coup. Ça exclut complètement la notion que la conception peut mener à de bons résultats.
Cette direction unique de la complexité garantit qu'une conception interférera avec la construction de choses complexes, en empêchant l'émergence de se produire correctement. C'est pour ça qu'un livre qui utilise des structures littéraires prédéfinies produira un contenu ennuyeux. C'est pour ça qu'introduire un changement génétique délibérément, pour concevoir un résultat, ne marche jamais sans effets secondaires. C'est pour ça que la "médecine de précision" est un oxymore. C'est pour ça qu'une ingénierie sociale drastique mènera éventuellement à des atrocités. Une bonne conception sous la complexité n'est pas une question de difficulté, mais d'impossibilité.
Introduire des changements aux entrées produira, par définition, un large éventail de changements aux sorties. Quelques-uns de ces changements pourraient s'avérer souhaitables. Le mal de tête pourrait disparaître, les champs de maïs pourraient s'épanouir, le bébé pourrait avoir les yeux bleus. Ça veut pas dire que la cause a été identifiée. Ça veut juste dire que tourner une manivelle à une extrémité du système a mené à un changement reproductible à l'autre extrémité. Le DDT était très efficace pour contrôler les populations de moustiques, mais aussi efficace pour perturber les chaînes alimentaires, amincir les coquilles d'œufs et détruire les populations. Tout est connecté. La nature ne fonctionne pas sur les causes fictives définies par les humains. La complexité ne fonctionne pas sur un chemin des entrées aux sorties dans le sens déterministe. L'intervention dans les systèmes complexes est basée sur la conception, et la conception doit interférer de façon préjudiciable, parce qu'elle est basée sur une prémisse qui est diamétralement opposée à la façon dont les systèmes complexes produisent leurs résultats.
Connaître les propriétés associées à la complexité, et donc à la vie, nous permet de prendre de meilleures décisions basées sur des schémas universels qui sont associés à la complexité. Toutes les situations peuvent être mieux décidées parce que, plutôt que de baser les décisions sur une connaissance interne fictive (les raisons), on les base sur des propriétés universellement vraies qui sont garanties de se maintenir. Ça garantit pas des résultats spécifiques, mais ça garantit que les systèmes adhéreront à des contraintes et à des schémas qu'on connaît déjà.
La validation a toujours joué un rôle central dans la conception. D'innombrables processus ont été inventés pour aider à confirmer qu'une conception répond aux besoins et aux exigences des utilisateurs finaux et des autres intervenants. Le but de la validation est de s'assurer qu'une conception résoudra le problème qu'elle était censée résoudre. Bien sûr, tout ça dépend entièrement du déterminisme causal des machines simples, qui n'existe pas sous la complexité. Alors, qu'est-ce que la validation signifie quand on construit des choses complexes? Comment peut-on savoir que notre travail est conforme à ce qui est nécessaire pour résoudre le problème?
La différence clé, c'est que les solutions complexes ne peuvent pas résoudre les problèmes comme prévu (dans le sens d'un processus connu) parce que l'intention sent la conception. On peut pas connaître les détails sur la façon dont les entrailles internes de nos inventions complexes résolvent les problèmes parce qu'il y a pas d'"entrailles" dans le sens réductionniste.
Et pourtant, la validation est importante. On doit valider la réalisation automatique des abstractions physiques, qui calculent les réponses aux problèmes naturellement difficiles. On peut pas écrire un livre entier sans une forme de validation en cours de route vers la fin. On peut pas concevoir le prochain système d'apprentissage profond sans valider que nos efforts continus sont conformes à la connaissance sur les systèmes. C'est vrai, mais ce qui est essentiel, c'est la redéfinition de ce qui constitue la connaissance sur les systèmes.
Comme on l'a dit avant, ce sont les propriétés de la complexité qui comptent maintenant. C'est ce qui délimite les bonnes des mauvaises solutions. Ces propriétés sont ce à quoi on doit se conformer. Mais il faut faire attention avec le mot conformer. Rappelez-vous la direction de la complexité. La validation sous la complexité peut seulement fonctionner après coup, pas avant.
Quelque chose se conforme quand il se conforme à des règles, des normes ou des lois. Dans le paradigme scientifique et technique actuel, ça se produit dans la direction opposée à la complexité. Les règles, les normes ou les lois utilisées sont mises en place au début, et on s'attend à ce que notre travail s'y conforme en cours de route. Dans la complexité, cette conformité doit fonctionner dans la direction opposée. Les règles, les normes et les lois doivent seulement être utilisées comme des signaux que notre utilisation de l'essai-erreur et de l'heuristique se déroule bien.
Il s'agit de s'assurer que les structures à l'intérieur des entrailles de nos créations émergent. Les règles, les normes et les lois de la conformité sont seulement là pour aider à signaler que ce qu'on crée présente des propriétés auxquelles on s'attend. Ce qui fait que les propriétés, au lieu des raisons, fonctionnent sous la complexité, c'est qu'elles n'interfèrent pas. Les propriétés n'interviennent pas sur le flux organique et l'arrivée des détails internes de notre création.
Ça rend les propriétés catégoriquement méta. Pre