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Calculating...

Alors, euh, parlons un peu de physique. C'est marrant, parce que, vous savez, Werner Heisenberg disait : "L'univers n'est pas seulement plus étrange qu'on ne le pense, il est plus étrange qu'on ne peut le penser." Et c'est tellement vrai !

Vous avez déjà vu un grand oiseau décoller ? Il court, il court, il bat des ailes de plus en plus vite, et puis, hop, il s'envole. Eh bien, c'est un peu nous, quand on combine notre QI et notre "SQ", notre intelligence spirituelle, si on veut.

Avec notre QI, notre logique, on avance bien, pas à pas, vers la solution d'un problème. Mais avec notre SQ, cette espèce de super-pouvoir cognitif naturel, on bat des ailes et on s'envole ! On atteint des sommets inaccessibles à pied. C'est dingue, non ?

Notre SQ nous emmène dans des endroits que notre QI ne peut ni voir, ni prouver, ni même imaginer. C'est le moteur de cette curiosité humaine, cette curiosité sans limites qu'on a.

Ça me fait penser à une chanson qui était populaire juste après la Première Guerre mondiale. Les soldats américains, beaucoup d'entre eux des gars de la ferme, revenaient d'endroits exotiques... "Comment les retenir à la ferme après qu'ils ont vu Paris ?" Ça disait. C'est ça !

L'intelligence de notre SQ, elle est insondable, elle est pénétrante. Elle nous ouvre les yeux sur des réalités trans-logiques, quoi. Une fois qu'on l'a utilisée, plus rien ne nous retient à la ferme darwinienne, jamais plus.

C'est grâce à notre SQ qu'on est curieux des ondes gravitationnelles, des neutrinos, du vide quantique... Des trucs qui n'ont, apparemment, aucun rapport avec notre lutte pour survivre. D'ailleurs, la poursuite de ces phénomènes ésotériques a même produit des inventions qui mettent notre existence en danger, c'est paradoxal !

Pourquoi on est câblés pour être curieux des mystères les plus lointains, les plus obscurs du monde ? Et de ce qu'il pourrait y avoir au-delà ?

C'est pas un défaut de conception, comme certains athées le disent. C'est la preuve que ces réalités exotiques existent bel et bien, des réalités qu'on ne peut pas voir, pas prouver, pas même imaginer.

Et personne ne le sait mieux que mes collègues physiciens.

La physique, la science en général, c'est comme un adolescent. Ça ne cesse de grandir. C'est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle.

C'est bien, parce que les physiciens apprennent constamment des choses nouvelles et surprenantes. C'est moins bien, parce que ça veut dire que les théories scientifiques sont... périssables, quoi. Les nouvelles découvertes remettent toujours en question le statu quo, elles chassent les idées fausses et la foi mal placée qui pourraient influencer la vision du monde du physicien.

De temps en temps, les nouvelles leçons obligent à des remaniements majeurs de la vision du monde des physiciens. Des "poussées de croissance" quoi.

Si je devais comparer la physique à un animal, ce serait pas un serpent qui mue en grandissant. Ce serait plutôt un nautile, qui agrandit sans cesse sa coquille, avec élégance.

En grandissant, la physique n'abandonne pas complètement ses anciennes croyances, elle les modifie, elle les réinterprète, elle les complète. Du coup, la physique moderne conserve des vestiges même de la physique aristotélicienne.

La preuve : Aristote laissait les dieux intervenir dans ses explications du monde naturel. Dans sa "Métaphysique", il écrit : "Nos ancêtres dans les temps les plus reculés ont transmis à leur postérité une tradition, sous forme de mythe, selon laquelle ces corps [le soleil, la lune, les planètes] sont des dieux, et que le divin renferme la totalité de la nature. […] Il faut considérer cela comme une parole inspirée."

La physique moderne n'autorise plus ces références directes aux dieux dans ses explications, mais ces dernières décennies, surtout, elle a de plus en plus recours à des concepts qui... qui sentent bon la métaphysique. En fait, comme je vais vous l'expliquer, beaucoup de ces concepts sont plus fantastiques que tout ce qu'on peut trouver dans la physique d'Aristote, ou même dans "Alice au pays des merveilles".

Imaginez, un peu, ce pays des merveilles de la physique...

Le 9 juin 1905, la prestigieuse revue scientifique allemande "Annalen der Physik" a publié un article soumis par un jeune physicien inconnu, Albert Einstein. Le titre était banal et ésotérique : "Sur un point de vue heuristique concernant la création et la conversion de la lumière."

En fait, ça a été l'équivalent du coup de feu tiré au début de la Révolution américaine. Le moment où la physique a subi sa plus grande transformation depuis Aristote et Newton. Le moment où la physique a traversé le miroir.

On appelle ça la physique quantique. "C'était tellement révolutionnaire, remarque le légendaire Isaac Asimov, que presque aucun physicien ne pouvait se résoudre à l'accepter."

J'ai pas assez de temps ici pour expliquer complètement la physique quantique. Et même si je l'avais, je ne pourrais pas le faire.

Personne ne peut expliquer complètement la physique quantique. Pas même le regretté prix Nobel Richard Feynman, qui avouait candidement dans "La nature de la loi physique" : "Je crois pouvoir dire en toute sécurité que personne ne comprend la mécanique quantique."

La physique quantique (ou mécanique quantique) est un travail en cours. Un gâteau à moitié cuit. Un enfant extrêmement bizarre qui est encore en train de grandir.

La physique quantique nous offre des aperçus alléchants, mais pas une vision complète, de l'étrangeté microscopique de ce pays des merveilles. Elle offre des équations explicites, mais des interprétations conflictuelles des équations.

C'est comme une pièce qui tombe entre les coussins du canapé. Plus on essaie de l'attraper, plus elle nous échappe.

Voilà, c'est ça, la physique quantique, en résumé.

Pour voir plus clairement ce que je veux dire, regardez un peu ces cinq affirmations choquantes que la physique quantique fait sur le pays des merveilles. Des affirmations qui dépassent notre capacité à comprendre. Elles défient les mots, elles défient les preuves, elles défient même l'imagination humaine. Pourtant, les physiciens y croient comme Aristote croyait aux dieux.

Premièrement, tous les habitants de ce pays sont paradoxaux.

Un rayon de lumière se comporte à la fois comme une particule et comme une onde. C'est comme dire que quelque chose est à la fois noir et blanc.

Personne ne peut comprendre une contradiction logique aussi flagrante, pas même Einstein.

En 1954, un an avant sa mort, Einstein confiait à son vieil ami Michele Besso : "Les cinquante années de réflexion consciente ne m'ont pas rapproché de la réponse à la question : 'Que sont les quanta de lumière ?' Aujourd'hui, tout voyou croit savoir ce qu'ils sont, mais il se trompe."

Et l'étrangeté trans-logique ne s'arrête pas là.

Un électron, par exemple. Avant, les physiciens pensaient que c'était une particule, point final. Mais maintenant, on sait que lui aussi se comporte à la fois comme une particule et comme une onde. La découverte de cette réalité profonde, trans-logique, est attribuée à un étudiant français de noble naissance, Louis-Victor Pierre Raymond de Broglie.

Ces entités trans-logiques n'habitent pas seulement un royaume quantique lointain, un pays des merveilles. C'est de ça que vous et moi sommes faits !

Au fond de vous, vous êtes une contradiction logique vivante. Vous êtes une créature trans-logique, métaphysique, plus étrange, plus insondable, plus inimaginable que ce que votre propre esprit peut comprendre.

Deuxièmement, certains habitants de ce pays peuvent se téléporter et communiquer instantanément.

Pour aller du rez-de-chaussée d'un immeuble au vingtième étage, il faut prendre un ascenseur ou monter les escaliers. Même si on était Superman ou Superwoman, il faudrait quand même parcourir la distance entre les étages.

Dans le pays des merveilles, pas forcément. Par exemple, un atome, c'est comme un gratte-ciel avec plein d'étages. Selon la physique quantique, les électrons peuvent aller d'un étage à l'autre sans traverser les étages intermédiaires. Littéralement, ils se dématérialisent d'un étage et se rematérialisent instantanément à un autre.

Ensuite, il y a l'histoire de la communication. Normalement, il faut du temps pour envoyer un message de A à B. Même les messages instantanés d'aujourd'hui prennent du temps pour arriver au récepteur.

Mais pas forcément dans le pays des merveilles. Par exemple, un électron tourne sur lui-même comme une toupie, soit dans le sens des aiguilles d'une montre, soit dans le sens inverse. Imaginons que deux électrons du même atome s'éloignent l'un de l'autre comme des jumeaux séparés à la naissance, chacun avec une certaine rotation. Mesurer la rotation d'un électron affecte instantanément la rotation de l'autre. C'est comme si les deux électrons communiquaient par télépathie. On appelle ça l'intrication quantique.

L'intrication quantique a été corroborée par de nombreuses expériences.

Troisièmement, les habitants de ce pays peuvent exister à plusieurs endroits en même temps.

Quand j'étais au collège, mon prof de sciences nous disait qu'un atome, c'est comme un système solaire miniature. Au centre, il y a un noyau fait de neutrons et de protons, et autour du noyau tournent les électrons, comme des planètes.

Tout ça, c'est du passé.

Selon la physique quantique, un atome est tout étalé, comme une onde géante. Mais pas comme une vague à la plage. C'est comme une onde de probabilité.

Les chances qu'un atome soit à un endroit donné sont assez élevées. Mais... il y a une chance, même infinitésimale, qu'il soit ailleurs. Peut-être même à l'autre bout de l'univers.

À tout moment, un atome typique est probablement là où la physique classique dit qu'il devrait être. Mais on ne peut pas affirmer qu'il y est avec une certitude absolue, parce qu'il peut être à plusieurs endroits en même temps.

C'est vrai pour tous les habitants microscopiques typiques du pays des merveilles, pas seulement les atomes. Ils ont cette propriété bizarre d'être étalés à plusieurs endroits en même temps.

Quatrièmement, les expériences dans ce pays ne sont jamais vraiment objectives.

En général, les physiciens font de leur mieux pour ne pas laisser les biais et le manque de rigueur gâcher les résultats de leurs expériences. Mais selon la physique quantique, l'objectivité est un peu un mythe.

Pourquoi ? Parce que les physiciens et leur matériel ne peuvent pas éviter d'interagir avec ce qu'ils observent. Cette interaction affecte forcément l'observation.

Cette corruption involontaire est particulièrement importante quand on observe des choses minuscules, comme les quanta de lumière et les particules subatomiques. Mais elle affecte en fin de compte toutes les expériences.

On a déjà entendu dire : "La beauté est dans l'œil de celui qui regarde." Ça veut dire que la beauté n'a pas de sens indépendamment de l'observateur. La beauté et son observateur sont inextricablement liés.

De même, on peut dire que la totalité du pays des merveilles n'a pas de sens sans observateurs pour le décrire. Le pays des merveilles et ses observateurs, ses habitants dotés de conscience, c'est-à-dire nous, sont inextricablement liés.

"L'univers ne pourrait exister que si quelqu'un l'observait", dit Sir Martin Rees. "L'univers existe parce que nous sommes conscients de son existence."

L'objectivité, c'est un mythe, donc.

Cinquièmement, on ne pourra jamais tout savoir sur ce pays des merveilles. Jamais.

On fait des tas de mesures dans la vie. On monte sur une balance pour se peser. On mesure les fenêtres de son salon pour acheter de nouveaux rideaux. On verse soigneusement les ingrédients d'une recette. On suit la taille de son enfant qui grandit.

Pour les physiciens, les mesures, c'est essentiel.

La température de la Terre. La masse d'un glacier. Le diamètre de l'orbite d'un satellite. L'âge de l'univers. Les physiciens doivent faire des mesures correctes à chaque fois s'ils veulent être publiés, être crus par le public, obtenir des financements et gagner des prix prestigieux.

À l'époque d'Aristote et de Newton, les physiciens pensaient qu'il n'y avait pas de limite à la précision d'une mesure. Ils étaient convaincus qu'un jour, avec la bonne dose d'intelligence, de compétence et de matériel, ils pourraient cerner chaque petit détail de l'univers avec une précision illimitée.

Et puis 1927 est arrivé.

Cette année-là, Werner Heisenberg a publié une expression mathématique appelée le principe d'incertitude. Il affirme que, même si on essaie très fort, même si on est très intelligent et compétent, on ne pourra jamais tout savoir sur l'univers.

Parlons un peu de relativité.

Einstein a affirmé que l'univers n'a pas seulement trois dimensions spatiales, mais quatre dimensions : haut/bas, droite/gauche, avant/arrière, et le temps.

Il a affirmé que les distances, les temps et les masses ne sont pas inflexibles, mais élastiques. La longueur d'un pied, la durée d'une minute, la masse d'un centime dépendent de notre situation particulière. Plus précisément, de notre vitesse par rapport à la chose qu'on mesure.

Einstein a affirmé que la vitesse de la lumière dans le vide est un absolu : 299 792 458 mètres par seconde.

Einstein a affirmé que la gravité est causée par des creux dans le tissu élastique de l'espace-temps à quatre dimensions. C'est pour ça qu'on tombe, à cause des creux.

Tout ça, c'est peut-être loin de nos préoccupations quotidiennes. Mais ça compte quand même.

Votre monde de tous les jours, c'est une bulle de normalité. Une bulle de réalité banale qui, certains jours, vous donne l'impression d'être piégé, ennuyé, voire déprimé.

Mais si vous connaissez et comprenez les découvertes de la physique moderne, elles sont libératrices. Grâce à ces révélations, vous réalisez, comme Truman, qu'il y a plus dans la vie que votre bulle de normalité quotidienne.

Vous réalisez maintenant que vous faites partie intégrante d'un pays des merveilles qui existe, pas quelque part au loin, mais tout autour de vous, et même à l'intérieur de vous. À l'intérieur même des cellules de votre corps et de votre cerveau. Un pays des merveilles éblouissant, trans-logique, que même Lewis Carroll n'aurait jamais pu imaginer.

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